Aucune base de données publique ne recense l’ensemble des propriétaires fonciers en France. Le Cadastre ne dévoile que des informations parcellaires, et l’administration fiscale protège l’identité des détenteurs de grandes surfaces. L’opacité demeure, malgré l’ampleur des enjeux économiques liés à la terre.
Les dix plus gros propriétaires privés contrôlent davantage de terres que certains départements entiers.
Pour mesurer l’ampleur de cette concentration, il suffit de regarder les profils qui s’imposent en tête du classement :
- Groupes industriels, familles historiques ou investisseurs institutionnels détiennent des milliers d’hectares, en particulier dans le secteur agricole.
- Cette concentration influence directement la valeur du foncier, les usages des sols et l’accès à la propriété.
La France, un pays de grands propriétaires fonciers ?
Impossible d’ignorer la place prise par quelques grands acteurs sur la carte foncière française. On observe une concentration marquante des terres détenues par un cercle restreint de puissances publiques et privées. D’un côté, le secteur public occupe le devant de la scène : la Caisse des dépôts, par l’intermédiaire de la Société forestière, gère près de 150 000 hectares, l’équivalent de plusieurs départements à elle seule. Le ministère de la Défense s’arroge 100 000 hectares de forêts, tandis que les collectivités, départements et régions conservent 15 % de la surface boisée du pays.
Face à ces mastodontes publics, une poignée d’entités privées se distingue aussi par la taille de leurs emprises. Le groupe Louis Dreyfus détient la forêt de Lanouée (Morbihan) et investit dans de nombreux massifs grâce à sa filiale Ressources forestières. La famille d’Orléans possède 2 000 hectares en Thiérache, le groupe Lactalis (famille Besnier) exploite une grande forêt dans le Perche, et le groupe Dassault a la main sur une réserve de chasse de 800 hectares à Rambouillet. Les compagnies d’assurance Groupama et Axa ne sont pas en reste et figurent parmi les plus gros détenteurs de massifs forestiers.
Le secteur ferroviaire, lui aussi, pèse lourd dans la balance. La SNCF, à travers SNCF Immobilier, détient 20 000 hectares de foncier et 12 millions de mètres carrés de bâtiments industriels. Cette structure conduit de vastes projets urbains, notamment via Espaces Ferroviaires, et gère 100 000 logements, dont 90 000 à vocation sociale sous la bannière d’ICF Habitat.
Voici quelques chiffres-clés pour saisir l’ampleur de la concentration foncière en France :
- Caisse des dépôts : 150 000 hectares
- Ministère de la Défense : 100 000 hectares
- SNCF : 20 000 hectares
- Groupes privés (Louis Dreyfus, Dassault, Lactalis, Orléans …) : plusieurs milliers d’hectares chacun
Au final, la propriété du sol en France s’organise autour de ces puissances publiques et de quelques groupes privés dont le poids façonne durablement le paysage, influence les politiques d’urbanisme et oriente le développement des territoires.
Qui possède vraiment le plus de terres aujourd’hui : panorama des acteurs majeurs
Le paysage foncier français se dessine à travers un face-à-face entre géants publics et privés, chacun se distinguant par la surface détenue et la stratégie poursuivie. L’État arrive en tête, notamment grâce à la Caisse des dépôts qui supervise près de 150 000 hectares, principalement en forêts. Le ministère de la Défense conserve 100 000 hectares, en grande partie boisés et dédiés à des usages militaires ou environnementaux. Les collectivités locales, communes, départements, régions, réunissent à elles seules 15 % des forêts françaises, contribuant à l’ossature verte du pays.
Dans le secteur privé, la diversité existe mais la concentration s’accentue. Le groupe Louis Dreyfus s’illustre comme propriétaire majeur avec la forêt de Lanouée (Morbihan) et poursuit son expansion via Ressources forestières. La famille d’Orléans détient 2 000 hectares en Thiérache, le groupe Lactalis exploite une grande forêt dans le Perche, et le groupe Dassault gère une réserve de chasse de 800 hectares à Rambouillet. Les compagnies d’assurances Groupama et Axa affichent également d’importantes surfaces forestières, réparties sur plusieurs départements.
La SNCF, par sa filiale SNCF Immobilier, détient 20 000 hectares et 12 millions de mètres carrés de bâtiments industriels, tout en pilotant la transformation de nombreux quartiers urbains via Espaces Ferroviaires et la gestion de 100 000 logements. L’accès à la terre agricole, lui, reste largement dominé par les personnes physiques : elles détiennent 85 % des surfaces agricoles françaises. Les sociétés agricoles en possèdent à peine 7,5 %, souvent à travers des structures juridiques conçues pour faciliter la transmission ou l’investissement. L’association Terre de Liens, engagée pour une propriété foncière responsable, gère 9 000 hectares, une surface encore modeste à l’échelle nationale.
Pour avoir une vision globale des grands acteurs, il suffit de retenir :
- Caisse des dépôts : 150 000 hectares
- Ministère de la Défense : 100 000 hectares
- SNCF : 20 000 hectares
- Groupes privés (Louis Dreyfus, Dassault, Lactalis, Orléans, assurances) : plusieurs milliers d’hectares chacun
- Personnes physiques : 85 % des terres agricoles
Au fil des décennies, cette structure foncière a figé le rapport de force entre pouvoirs publics, grands groupes privés et particuliers, imprimant son rythme à tout le secteur immobilier et agricole.
Terres agricoles : pourquoi leur concentration suscite autant de questions
La concentration des terres agricoles en France s’accentue d’année en année, alimentant débats et crispations jusque dans les villages les plus reculés. Aujourd’hui, moins de 3 % des propriétaires fonciers contrôlent près de la moitié de la surface agricole utile. Ce mouvement bouleverse l’accès à la terre pour les jeunes agriculteurs, complique l’installation hors cadre familial et fragilise le modèle d’agriculture transmis de génération en génération.
Dans les faits, 85 % des terres agricoles françaises restent entre les mains de personnes physiques, héritées au fil des successions. Les sociétés agricoles concentrent 7,5 % du foncier, souvent via des montages juridiques comme les sociétés civiles ou groupements fonciers agricoles. Ces structures facilitent la transmission et l’investissement, mais accélèrent aussi la concentration.
Face à cette tendance, la régulation foncière tente de poser des freins. La loi Sempastous, votée en 2021, ajoute des garde-fous pour limiter l’extension des sociétés sur les exploitations. Les SAFER disposent d’un droit de préemption, censé garantir un équilibre, mais la spéculation progresse, les prix grimpent, et l’accès au foncier se complique pour celles et ceux qui souhaitent débuter sans héritage.
Dans ce paysage tendu, des acteurs comme Terre de Liens expérimentent d’autres formes de gestion collective des terres. Leur surface, 9 000 hectares, reste modeste, mais leur démarche interroge le modèle dominant. L’enjeu ne se limite plus à la production agricole : il touche désormais à la souveraineté alimentaire, à la vitalité des territoires et même à l’équité sociale.
Transparence et accès aux données : un enjeu clé pour comprendre la propriété foncière
Le manque de transparence qui entoure la propriété foncière en France ne cesse d’alimenter les interrogations. Impossible de dresser un portrait fidèle des détenteurs de terres tant les informations officielles sont dispersées ou verrouillées. Le rapport de Terre de Liens pointe la difficulté d’obtenir une cartographie précise des propriétaires, qu’ils soient particuliers, sociétés ou acteurs institutionnels.
Les fichiers fonciers, pourtant collectés par l’administration, ne sont accessibles qu’en partie, souvent réservés à quelques professionnels ou chercheurs avertis. Cette opacité entrave l’analyse de la répartition réelle des surfaces agricoles ou forestières. Terre de Liens plaide pour une ouverture des données, une publicité accrue sur les montages juridiques, sociétés civiles, groupements fonciers, qui dissimulent parfois l’identité des véritables détenteurs.
Quelques questions majeures se posent, illustrant le besoin d’un accès élargi à l’information :
- Qui détient les 150 000 hectares gérés par la Caisse des dépôts via la Société forestière ?
- Quelle est la part exacte des collectivités dans les 15 % de surfaces boisées françaises ?
- Comment évolue la concentration foncière au sein des grandes familles ou groupes privés comme Louis Dreyfus, Dassault, Groupama ou Axa ?
Rendre ces données accessibles conditionne la capacité des citoyens, décideurs et chercheurs à comprendre les effets de la concentration foncière, à en débattre et à bâtir d’autres modèles de gestion des terres. Les initiatives de Terre de Liens, du Cerema ou de la Sfer montrent la voie pour ouvrir ce débat. Mais la route reste longue avant de lever le voile sur la véritable cartographie de la propriété du sol en France.